Les dépenses de ma mère Suzanne Lesquoy: carnet n°40 entre octobre 1956 et avril 1957
Voici le 40ème carnet rempli par ma mère, veuve depuis maintenant deux mois, avec trois garçons à élever. Je n'ai que deux ans et demi et ne peux donc entrer en maternelle, même si l'école du centre de Longuyon est en face de chez nous, rue Albert Lebrun. Ma mère ne peut donc envisager de chercher un travail et va faire vivre jusqu'à l'automne 1957 la famille avec l'argent reçu de l'usine où travaillait mon père et les différentes aides versées. Elle gère désormais seule son budget et certaines dépenses ont évidemment disparu, notamment celles consacrées à la boisson alcoolisée... Autant que je me souvienne, je n'ai jamais vu ma mère boire une goutte de vin. C'était banni pour longtemps du foyer.
Progressivement les "ardoises" au magasin Familistère s'effaceront définitivement. Des investissements vont pouvoir être réalisés pour améliorer un peu le confort de la maison que nous louons à Mme et M. Ponozny. Le 16 octobre, un prêt de 12000 Fr est même accordé à mon oncle Pierrot, alors âgé de 19 ans, pour un vélo. Le 25 octobre la somme de 400000 Fr est déposée à la caisse d'épargne de la Poste. Le 8 novembre ma mère prête 1000 Fr "chez nous" c'est-à-dire à ses parents. Peut-être que mon grand-père Maurice voulait changer sa 2CV Citroën! (Il en a eu trois en tout). Différents noms de commerçants apparaissent: les meubles Parance, la pharmacie Chézeau, le docteur Cochart, la droguerie François, la boulangerie Him, la bonneterie Giner, les chaussures Robin, la boucherie charcuterie Bragard.
Ce carnet de trente feuillets à la couverture beige est orné d'un dessin d'autocar, sans doute réalisé par un de mes deux frères. Lorsque ma mère a commencé à tenir un journal quotidien vers 1967, elle a d'abord résumé les temps forts depuis son mariage, dont je publie ici les deux premières pages.